L’esprit des arts martiaux.
C’est ce qu’a transmis Maître Hiroo Mochizuki aux nombreux stagiaires venus de diverses disciplines martiales, et qui se sont rejoints dans l’étude des gestes techniques efficaces et de leur esthétisation. Dans « art martial », rappelait le Maître, il y a aussi le mot « art. »
De l’échauffement à la rencontre d’un adversaire, Maître Mochizuki traite de situations réelles, de corps réels, avec leur dynamiques et avec leurs limites. Un coup de poing, un coup de sabre ou une projection, tout est du pareil au même, tout part de la hanche. Ainsi a-t-il expliqué devant les stagiaires captivés, la mécanique de relâchement musculaire de « l’ondulation, » en passant par l’image du fouet qui est l’âme du Yoseikan Budo.
L’amélioration du geste martial passe par la science, disait-il encore, à la fois fermement façonné par la tradition japonaise des budos et à l’affût de l’évolution. Il est toujours en recherche du mouvement efficace, et l’efficacité évolue en même temps que les pratiques, elle s’adapte et se perfectionne sans cesse. La perfection est dans le changement, dans la capacité d’adaptation. Les katas sont « une mémoire technique, » pour le corps comme une encyclopédie spatiale. Un des but des katas, c’est de voir si l’ont peut « sortir » la puissance de chaque mouvements. Mais les katas ne doivent pas être gravés dans le marbre et pétrifier l’évolution. La compréhension du système ostéo-articulaire, du corps humain et des sciences physiques, c’est aussi une partie de l’art martial. Vient ensuite le beau geste, celui qui est réservé aux présentations de l’art.
Et de faire une démonstration de l’ondulation et de faire travailler ces pratiquants de tous horizons qui s’efforçaient de profiler le mouvement, d’exécuter les frappes qui les amèneraient à former les muscles et les réflexes encore inexistants pour certains sinon pour beaucoup.
Bien plus qu’une technique, Maître Mochizuki a transmis une inspiration, sa vision du Yoseikan Budo et la progression constante à laquelle il aspire toujours, avec l’aplomb de ses 83 ans et d’une vie entière de pratique martiale.
Matinée :
Au programme de la matinée les stagiaires ont pu travailler un échauffement spécifique au travers d’exercices déjà techniques : immobilisation au sol avec étirement des chaines musculaires antérieure et postérieure, via des immobilisations et des clefs.
S’en suivit un travail du mouvement ondulatoire latéral sur la base de parades de karaté sur uraken, puis sur shuto-uke, d’abord en avançant, avec le « retour de hanche » en sens contraire du mouvement de hanche, puis en faisant des mawate (demi-tour), dans le sens de la hanche. Le travail de l’ondulation centrale s’est fait ensuite sur Jodan age uke. Les détails de ces principes ont été appliqués sur d’autres parades de types gedan baraï et uchi uke. Pour finir, un travail de l’ondulation sur les mouvements simultanés comme on peut les retrouver dans Yama tsuki (Basaï) et sur le dernier mouvement de Pinan Godan.
L’après-midi :
Le Maître a réservé aux enfants des exercices de pédagogie ludique sur l’esquive, de type ballon prisonnier, suivis d’ateliers de frappes sur cible. Ils ont été rejoints par des stagiaires (et professeurs) adultes pour travailler les réflexes des frappes de pied (mae geri, mawashi geri, yoko geri).
Le stage ado-adultes de l’après-midi s’est ouvert sur une démonstration de Iaido (l’art de dégainer le sabre) avec les démonstrations et explications en binôme, assisté de Mickaël Mas. Le Maître a montré la relation de transmission de puissance qu’il y avait entre les mouvements à mains nues et le sabre, le naginata et le jo. Si les karatékas comprennent correctement les mouvements de karaté, dit-il, alors c’est qu’ils comprennent aussi les mouvements de Iaido. Mais encore, faut-il appréhender le temps et la distance dans l’attaque.
Aussi, les stagiaires enchaînèrent sur un travail des fondamentaux : temps, distance et stratégie.
Ils ont pu voir les trois distances (ma-ai) : la distance de poing, chika-ma ; la distance de pied, ma et le hors distance, too-ma. Ainsi que les notions de timing « hyoshi » en Yoseikan : machi no sen / go no sen au karaté (« attendre dans le temps » réaction après l’attaque), tai no sen (« corps dans le temps », réaction dans le temps, durant le déroulement de l’attaque), sen (avance positive, initiative au combat. Temps d’action sur l’intention adverse) et
sen no sen (« avance dans le temps, » anticipation de l’intention d’attaque de l’adversaire). La nuance entre sen et sen no sen est infime.
Quant aux trois temps de la stratégie : tsukuri (piège), kuzushi (prendre l’appât) et kake (le placement de la technique).
« Pour moi, le maître mot des arts martiaux, c’est : « stratégie » (« TSUKURI »). A savoir l’art d’utiliser la distance (« ma ») et la tactique appropriées pour piéger l’adversaire en l’amenant là où l’on a décidé de l’amener. S’y ajoute la notion de timing (« hyoshi ») pour prendre l’initiative (« sen ») afin de provoquer le déséquilibre de l’adversaire physiquement et mentalement (« KUZUSHI »). Enfin vient l’exécution technique – « KAKE ». Malheureusement, la plupart des écoles à l’heure actuelle enseignent seulement cette dernière partie, qui est inutile et vide de sens sans les deux autres. » Hiroo Mochizuki
La théorie était énergiquement mise en pratique avec des exercices de coups de poing et de coups de pied.
Merci à tous.
Nous remercions chaleureusement le Maître pour son enseignement exceptionnel ; et nous remercions les pratiquants venus de près et de loin qui en dépit de la chaleur, se sont montrés aussi réceptifs lors des moments magistraux que combatifs dans les exercices martiaux.